Financer la transition agroécologique

L’investissement, indispensable pour des filières durables

L’absence de capacité d’épargne, due au fait que les revenus dégagés par les petit.e.s producteur.ice.s sont très faibles, empêche tout réinvestissement dans les parcelles. Or, pour qu’une agricole reste rentable, la régénération des ressources naturelles et des plantations est un investissement indispensable : naturellement, au bout de plusieurs années d’exploitation, les rendements baissent. La combinaison entre une culture de rente faiblement rémunératrice et instable et des productions vivrières insuffisantes crée une insécurité alimentaire pour les familles productrices. À cela s’ajoute un coût de la vie relativement élevé, expliqué en partie par l’indexation du franc CFA à l’euro, et la disparition de la forêt qui procurait auparavant des ressources alimentaires à la marge (animaux ou végétaux).

Le commerce équitable est une démarche qui vise à renforcer le poids des producteur·rice·s et de leurs organisations au sein des filières agricoles et constitue un levier de la transition agroécologique. Au-delà de standards aux degrés d’ambition divers concernant la promotion de la transition agroécologique, l’accès facilité aux financements grâce aux deux sous-composantes du Programme Équité : « Renforcement des capacités d’accès des OPs aux financements et outils numériques » et « Fonds pilote pour le financement de la transition agroécologique sur la filière cacao » permettent de réduire les risques sur la production agricole, de bénéficier de prix suffisamment élevés pour les producteur·ice·s, et d’investir davantage dans leurs systèmes de production.

L’une de ces sous-composantes permet le renforcement des capacités d’accès des organisations de producteur·ice·s certifiées équitables en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Mali, au Burkina Faso et au Togo aux financements et aux outils numériques. L’autre sous-composante est un fonds pilote pour le financement de la transition agroécologique pour les producteurs de cacao membres d’organisations de producteur·ice·s certifiées commerce équitable en Côte d’Ivoire.

Les objectifs du programme Equité :

  • Apporter un accompagnement personnalisé à ces coopératives pour l’élaboration de comptes d’exploitations, bilans financiers et business plans (même simplifiés) et la consolidation de dossiers de demande de financements robustes et crédibles
  • Faciliter la mise en relation entre les coopératives certifiées équitables en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Mali, au Burkina Faso et au Togo et des organismes financiers (OF), en caractérisant l’offre et la demande

Faciliter l’accès au financement

La plupart des organisations de producteur·ice·s impliquées sur les filières de commerce équitable en Afrique de l’Ouest font face à des défis majeurs en matière de structuration, d’organisation, de capacités de gestion, de gouvernance et de financement. Ces coopératives ont des besoins de financement variés (fonds de roulement, investissement, etc) dont l’accès requière des compétences en matière de gestion financière, et l’accès à une diversité de financeurs.

Pour y répondre, le programme Équité mobilise une assistance technique externe en Côté d’Ivoire, au Ghana, au Mali, au Burkina Faso et au Togo afin d’analyser les opportunités d’accès aux financements pour les coopératives, sur le plan national et international.

Les 3 leviers d’action du programme Equité

  • Les besoins de financement des coopératives certifiées de commerce équitable en matière de gestion financière et de recherche de financements seront identifiés. Un état des lieux des OFs et outils de financement disponibles et adaptés aux spécificités des différentes filières agricoles et artisanales sera réalisé, afin d’identifier par la suite les besoins d’accompagnement mis à disposition par le programme Équité (accès à des formations à la gestion financières, mise en relation avec des OF, dossiers de demande de financement).
  • Les coopératives certifiées seront formées à la gestion financière (plan de trésorerie/flux de trésorerie, dimensionnement d’un fonds de roulement, consolidation d’états financiers et comptables, calcul de seuil de rentabilité et de point d’équilibre, etc.). Au total, plus de 260 personnes, issues de plus de 80 coopératives préalablement sélectionnées, seront formées.
  • Les coopératives certifiées équitables seront accompagnées sur le montage de dossiers de demande de financements. Un.e consultant.e sera chargé.e de la mise en relation entre l’OF (ou les OFs) les plus pertinentes pour chaque OP et accompagnera ces dernières dans le montage de leur demande de financement en les aidant à établir à minima l’ensemble des éléments clés des dossiers de demande.

Expérimenter des modes de financement de la transition agroforestière

Parmi les filières de commerce équitable soutenues par le programme Équité, la filière cacao est celle qui présente les problématiques les plus marquées en matière de financement de la mise en place de systèmes de productions agroécologiques et plus particulièrement agroforestiers (SAF). Le modèle dominant « plein soleil » vulgarisé depuis plusieurs décennies est pratiqué par la plupart des producteur·ice·s ouest-africain·e·s. Mais ce modèle appauvrit rapidement la fertilité du sol, ce qui le rend vulnérable au réchauffement climatique, et incite les producteur·ice·s à défricher les forêts pour planter le cacao sur des sols plus riches.

Les systèmes agroforestiers sont aujourd’hui reconnus comme une solution d’avenir pour la filière cacao en Côte d’Ivoire. Cependant, le coût initial d’investissement pour l’installation d’une parcelle agroforestière peut être élevé. A titre d’illustration, le coût d’installation d’une parcelle du type SAF a été estimé à 1,5 millions Francs CFA/ha lors de la première phase du programme Équité, ce qui constitue un frein à son adoption à grande échelle. Cela s’explique par le fait que l’implantation de ces systèmes nécessite beaucoup de main-d’œuvre pour effectuer tous les travaux de préparation des sites et d’installation des parcelles (piquetage, trouaison, planting, entretien,) ainsi que l’acquisition de matériel végétal diversifié (arbres forestiers, arbres fruitiers, légumineuses, semences de cultures vivrières,).

Les revenus générés par ce type de SAF sont différés dans le temps. Les deux premières années permettent de réaliser un retour sur investissement grâce aux recettes de la vente des vivriers, tandis que le cacao, les arbres fruitiers (orangers, avocatiers …) puis les arbres forestiers (Akpi, Fraké) permettront sur le moyen et le long terme aux producteurs d’avoir une production rentable et des revenus pérennes. Cela signifie que jusqu’à l’entrée en production des cacaoyers et fruitiers, ces parcelles dégagent des marges nettes aux producteurs qui sont relativement faibles voire négatifs.  

Si les SAF sont rentables à long terme, les producteur·ice·s qui adoptent ces techniques agroforestières doivent être financièrement soutenus pour disposer de la trésorerie nécessaire à de tels investissements initiaux jusqu’à ce que ces SAF génèrent des revenus équivalents.

Le programme Équité s’est donc donné comme objectif de mettre en place un dispositif de financement expérimental et innovant pour faciliter la transition des producteur·ice·s vers des systèmes agroforestiers, plus productifs, plus résilients, avec moins d’apports d’intrants chimiques et réduisant les impacts de la déforestation.

Cette sous-composante du programme repose sur la mise en place et la gestion d’un fonds pilote destiné à l’octroi de prêts attractifs à des producteur.ice.s de cacao membres d’OPs certifiées commerce équitable en Côte d’Ivoire, et désireux de mettre en place ou de réhabiliter des parcelles de SAF à base de cacao.

Une première étape consiste en la réalisation d’une étude de faisabilité qui a pour but d’identifier les besoins et contraintes des coopératives certifiées sur la filière cacao et organismes financiers présents en Côte d’Ivoire et de proposer un mécanisme de financement en adéquation avec la situation analysée. A l’issue de cette étape, un organisme financier et des OP pilotes seront sélectionnés pour tester le dispositif expérimental qui sera partiellement subventionné par le programme.

Le cabinet HORUS Développement Finance a été sélectionné pour conduire l’étude de faisabilité de ce dispositif expérimental.